13
MAR
2014

«Saumonstre» ou «Frankenfish»?

Développé par la firme américaine A/F Protein inc., le saumon transgénique est actuellement produit par la compagnie Aqua Bounty technologies, basée dans le Massachusetts, mais possédant un établissement situé à St John’s, Terre-Neuve opérant sous le nom de Aqua Bounty Canada.

Parmi les améliorations génétiques soutenues, mentionnons ces trois principales : la résistance au froid, l’accélération du taux de croissance et l’adoption d’un régime alimentaire à base de végétaux moins polluants. La compagnie A/F Protein Canada (filiale de A/F Protein Inc), se spécialise dans l’utilisation de protéines antigel (antifreeze A/F) pour contrer les effets du froid et stimuler leur croissance même en période de gel. Les scientifiques ont donc introduit une protéine codant comme antigel provenant du tacaud, un poisson arctique, dans le génome du saumon de l’Atlantique. D’autres recherches ont été entreprises afin d’augmenter le taux de croissance du saumon d’élevage. Un gène relatif au taux de croissance chez le saumon du Pacifique a été ajouté au bagage génétique de ce saumon.

Le saumon AquAdvantage pourrait être le premier animal génétiquement modifié destiné à la consommation humaine. La Food and drug administration (FDA) est d’ores et déjà convaincue de l’absence de toxicité de cet aliment pour la santé humaine et soutien que les impacts environnementaux notamment sur la population des saumons sauvages de l’Atlantique sont minimes, puisque d’une part, ces poissons seront stériles à 95% et d’autre part, ils seront élevés dans des installations terrestres confinées. En novembre 2013, le Canada a donné son approbation à la production d’œufs de saumon OGM.

La commercialisation du saumon transgénique se heurte néanmoins aux associations de consommateurs qui jugent sévèrement les impacts de ce poisson notamment sur les écosystèmes marins (compte tenu de leur appétit vorace qui en fait des prédateurs importants dans leur milieu – le confinement absolu étant impossible à réaliser) et estiment aussi que « la FDA n’a pas levé tous les doutes en termes d’allergénicité ».

Du côté canadien, les groupes environnementaux demandent au Canada de retirer son approbation au saumon OGM alléguant que celui-ci a contrevenu à la Loi canadienne sur la protection de l’environnement en permettant l’élevage des poissons OGM sur la base d’une évaluation incomplète de la toxicité.

Cette décision du Canada survient alors que Pêches et Océans Canada notent une baisse de l’ordre de 90% de la population de saumons de la baie de Fundy confinant cette espèce au rang des espèces menacé d’extinction.

Quel que soit le nom qu’on lui donne, le Saumon AquaAdvantage bien qu’il soit produit, n’est pas commercialisé pour le moment. Or, si l’on octroie aux compagnies le droit de créer et de produire ne serait-il pas juste d’accorder aux consommateurs le droit de savoir et de choisir? Le débat pourrait se concentrer sur l’étiquetage obligatoire des aliments modifiés génétiquement.

Un dossier à suivre!

Sources :

AquaBounty Technologies, http://www.aquabounty.com/products/products-295.aspx

Alice Bomboy, « Du saumon transgénique dans les assiettes américaines », Sciences et actualités, 14 août 2013, http://www.universcience.fr/fr/science-actualites/enquete-as/wl/1248138980337/saumon-transgenique/

Pauline Gravel, « Du saumon transgénique américain dans nos assiettes? Le saumon AquAdvantage sera le premier animal OGM destiné à l’alimentation humaine », Le Devoir, 6 janvier 2012,  http://www.ledevoir.com/societe/science-et-technologie/339666/du-saumon-transgenique-americain-dans-nos-assiettes

Pêches et Océans Canada, Espèces aquatiques en péril, http://www.dfo-mpo.gc.ca/species-especes/species-especes/salmon-atl-saumon-fra.htm

Madame Morales enseigne la sécurité alimentaire, la législation de l'agroalimentaire et les droits économiques, sociaux et culturels. Elle est aussi étudiante au doctorat. Sa thèse porte sur la qualification juridique des ressources génétiques végétales dans l’atteinte de la sécurité alimentaire durable. Ses champs de recherche sont le droit à l’alimentation, la sécurité alimentaire et la gestion des ressources de l’agrobiodiversité sous l'angle du droit international public. Elle s’intéresse aussi à l'impact des biotechnologies agricoles sur l’accès et le partage des ressources phytogénétiques.

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